L'hôtellerie, chronique d'une mort annoncée?

L'hôtellerie, chronique d'une mort annoncée?

En lisant la presse de ces derniers jours, il y a un article dont le titre était particulièrement évocateur : “Le tourisme et l’hôtellerie tombés au champ d’honneur de la guerre sanitaire”. Ce titre est particulièrement bien trouvé puisqu’en effet, toutes les procédures de lutte contre la Covid n’ont eu de cesse de plomber l’économie nationale et tout particulièrement le secteur touristique.

Cela étant dit, maintenant que l’hôtellerie a été sérieusement touchée par la guerre anti-covid, toute la question réside dans future destinée:
  • Va-t-elle renaitre de ses cendres et briller encore plus qu’avant?
  • Va-t-elle doucement panser ses plaies et restée amputée d’une partie de son activité?
  • Va-t-elle succomber à ses blessures et mourir dans une longue agonie?

Car aussi impensable que cela puisse sembler, elle pourrait disparaitre! Faut-il rappeler le sort advenu à l’Orient Express suite aux guerres et aux fermetures de frontières? Alors certes on compare une marque à tout un secteur d’activité répandu dans le monde entier, mais prenons le temps d’observer les nouveaux comportements de clientèle quelques instants.

1/ La diversité de l’offre

Jusqu’à il y a peu, lorsqu’un individu souhaitait voyager, sa principale solution d’hébergement (hors famille et amis) était de résider à l’hôtel. Désormais, avec l’avènement d’Airbnb pour ne nommer que lui, il peut louer un appartement à un particulier. Et pour peu qu’il vienne avec toute sa famille, il peut louer une villa. Le parc immobilier alors disponible passe d’un nombre certains d’hôtels à littéralement toute surface habitable présente dans le périmètre de recherche.

2/ La tarification

A cela on ajoute le prix. Ce n’est un secret pour personne, le fait de résider dans la propriété d’un particulier permet de faire des économies. Si ce n’est pas sur le tarif par nuit, c’est sur les frais de restauration puisqu’il dispose dans l’un d’une cuisine que l’autre n’a pas.

3/ Le partage

Si notre client décide de voyager avec ses 3 meilleurs amis, dans un hôtel il aura le choix d’une double chambre twin ou d’une suite familiale ou alors de 2 chambres communicantes. Les espaces de vie vont être  réduits voire inexistants, autant dire que se marcher les uns sur les autres encore plus que lorsque l’on est à la maison, ca ne vend pas du rêve. Alors que de l’autre côté, il loue la maison ou l’appartement de vacances, il va pouvoir “respirer” quand même davantage. Et ne vous leurrez pas, le client va bien comparer les 2 solutions avant de faire son choix.

4/ L’intimité

Un autre aspect qu’il faut prendre en considération est l’intimité. Alors vous direz, il n’y a pas plus intime qu’une chambre d’hôtel et vous aurez raison sauf qu’une fois que le client a bien dormi, il se réveille et il a faim. Or pour se sustenter, il va devoir se faire tout beau tout propre car il va prendre l’ascenseur avec le risque potentiel de croiser d’autres clients, passer dans le lobby de l’hôtel avec là aussi le risque évident de croiser au moins une personne du staff, se prendre la bourrasque auditive de la salle de restaurant bondée et faire la queue avec son assiette au milieu des autres êtres humains plus ou moins majeurs qui se bousculent pour avoir la dernière crêpe. En somme, l’usage des espaces de vie sont utilisables par tous, alors qu’en maison ou appartement, il sont utilisés uniquement par les locataires. Leur intimité peut donc s’exprimer dans un espace bien plus grand que la seule chambre d’hôtel.

5/ Le parcours d’achat

Et enfin a-t-on parlé du processus d’achat? Parce que là c’est la cerise sur le gâteau! Alors, comment vous dire…  Essayons de nous mettre quelques instants à la place d’une personne qui veut séjourner à Nice par exemple. D’un côté elle va chercher sur Google Maps (ça marche aussi avec Booking.com) et de l’autre elle va se rendre sur Airbnb.

Sur le premier elle va d’abord avoir une offre pléthorique d’hôtels tous presque aussi bien les uns que les autres. Puis elle va en sélectionner un. Ensuite, elle doit encore faire le point sur le type de  chambre qu’elle veut parmi les 6 voire 9 catégories que l’hôtel propose et pour chaque catégorie il y a une multitude de tarifs différents : non annulable, petit-déjeuner inclus, late check-out, bouteille de champagne à l’arrivée, etc. Une fois qu’il a pris connaissance de toutes les catégories et de tous les tarifs, le client peut enfin procéder à l’étape suivante où on lui propose encore d’autres services optionnels avant de valider son paiement. Donc au total 4 étapes interminables qui requièrent de la concentration pour au final avoir une chambre que l’on n’a même pas vraiment vu étant donné que l’on s’est fondé sur 2 ou 3 images de la catégorie (des fois on n’a même pas la photo de la salle de bain!) et non précisément de la chambre que l’on va avoir.

Et d’un autre côté on a la réservation d’un appartement. Premier aspect, le client peut modifier ses filtres de manière à ce que la liste finale ne propose que des appartements tenant compte de ses besoins. La recherche est donc optimisée, le gain de temps est considérable. Deuxièmement, une fois l’appartement trouvé il n’y a qu’un seul tarif qui y est associé ce qui rend bien plus simple l’acte d’achat. Et enfin, dernière étape, ben c’est fini en fait. Le client a pu constater avec les photos la qualité de l’exact produit qu’il va consommer, le tarif est clair, les prestations associées également, les problématiques de récupération de clé ont été solutionnées depuis bien longtemps grâce à des boitiers. Tous les éléments sont réunis pour le processus d’achat. Dans ce cas-ci, on est face à un process de 2 étapes. Imbattable.

Conclusion

Comprenez bien une chose, ce n’est pas la faute à Airbnb si le monde de l’hébergement mute, c’est parce que l’hôtellerie n’a pas su – du moins pour le moment – s’adapter aux changements des modes de consommation de sa clientèle qu’elle souffre d’autant plus aujourd’hui. L’hôtellerie est restée paralysée dans un style classique où les chambres sont l’élément principal et les autres points de vente sont des compléments. Elle a oublié qu’avant tout elle vend de l’hébergement et que l’hébergement ne se résume pas à la chambre. Il y a d’autres facteurs à prendre en compte : le partage, l’intimité, l’immédiateté, etc. La situation sans précédent dans laquelle nous a plongé la Covid rend l’hôtellerie encore plus vulnérable car ses charges d’exploitation l’oblige à une rentabilité vitale. Il est donc important qu’elle aborde le virage des nouveaux modes de consommation avec intelligence.

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